Gisèle Pélicot entre debout dans le palais de justice et est accueillie par des applaudissements. Chaque jour du procès, des dizaines de femmes se tiennent dans la salle d'Avignon et applaudissent pendant quelques minutes l'homme de 71 ans. Certains crient « Merci ». Une organisation de défense des droits des femmes a recouvert les murs autour du palais de justice d'affiches disant « Un viol est un viol ». Derrière tout cela se cache un grand besoin pour de nombreuses femmes en France : exprimer leur solidarité avec celle qui comparaît depuis septembre au procès contre ses violeurs. Car l'attitude de Gisèle Pélicot et la puissante détermination avec laquelle elle endure tout ont fait d'elle une héroïne pour de nombreuses femmes en France et bien au-delà.
Banalisation et renversement auteur-victime
Cela doit être incroyablement grave pour une victime de viol de devoir faire face à l'agresseur devant un tribunal. Revivre la terrible expérience, ressasser le traumatisme et endurer les détails les plus intimes discutés en public. Il est tout à fait compréhensible que les femmes victimes de viol souhaitent réduire au maximum leur temps passé devant le tribunal.
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Il en va autrement pour Gisèle Pélicot : elle a décidé de rendre le processus public et souhaite être présente à chaque audience. Pour ce faire, elle accepte de devoir écouter tous les détails horribles de ses viols et même voir les vidéos des attaques enregistrées par son mari. Au début, les juges voulaient s'abstenir de montrer ces enregistrements. Mais Gisèle Pélicot a tenu à ce que tout soit montré. Le public devrait arrêter de détourner le regard, tout devrait enfin être révélé. De cette façon, elle veut avoir son mot à dire sur l’image que l’on donne d’elle. Car une chose est claire pour elle : elle n’a rien à se reprocher.
Il y a 51 hommes assis en face d'elle. Ils sont accusés d'avoir violé la femme alors qu'elle était inconsciente. Au total, son mari aurait invité plus de 90 hommes à violer sa femme droguée et sans défense. Depuis neuf ans. Jusqu’à présent, seuls quelques-uns ont avoué le crime, et aucun d’entre eux n’a montré le moindre signe de regret. Au lieu de cela, le même renversement auteur-victime s'opère : Gisèle Pélicot est rétrogradée comme complice et alcoolique - ce qu'elle rejette totalement. D'autres banalisent les viols : une prévenue répond aux questions sur le consentement que son mari a donné au sien : "C'était un cadeau de M. Pélicot". Une autre affirme qu'il n'est pas un violeur parce qu'il l'a caressée, et c'est ce que font les violeurs oui non.
"Tu n'es pas seul"
Pourquoi Gisèle Pélicot se fait-elle ça ? Au cours du procès, elle a expliqué à plusieurs reprises qu’elle souhaitait encourager toutes les autres femmes maltraitées et souligner leur sort : « Je veux que les femmes n’aient plus honte. Ce n’est pas nous qui devrions avoir honte, c’est eux ! », dit-elle en faisant référence aux auteurs. Elle a milité pour un procès public pour que toutes les femmes violées se disent : "Mme Pélicot l'a fait, nous pouvons le faire aussi. Gisèle Pélicot dit : "Regardez autour de vous, vous n'êtes pas seule."
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Comme elle a raison : dix pour cent des femmes en Allemagne ont été victimes d'un viol ou d'une tentative de viol. C’est ce qu’affirme l’association « Femmes contre les violences ». Mais les femmes ne signalent leurs violeurs que dans cinq à 15 pour cent des cas. Notre culture du viol y contribue, avec des reproches aux victimes tels que « Pourquoi s'habillait-elle comme ça ? », « Pourquoi buvait-elle autant ? », « Pourquoi sortait-elle seule le soir ? » Gisèle Pélicot veut lutter contre cela ? . Son objectif est de « mettre fin à la culture du viol et de changer la société ». Et elle veut souligner autre chose : que la violence existe aussi dans les familles et...représente un grand danger. Les auteurs se cachent souvent à proximité des victimes. « Le violeur n'est pas celui qu'on croise sur un parking tard le soir, explique Gisèle Pélicot. « Cela peut aussi être en famille, entre amis. »
Ce que le processus change déjà
Gisèle Pélicot a déjà accompli beaucoup de choses. «L'approche ouverte de Mme P. signifie que la violence sexuelle à l'égard des femmes est levée du tabou et que les mythes existants sont contrecarrés», explique Gerlinde Gröger, responsable du numéro d'urgence des femmes de Münster. L'affaire pourrait même marquer un véritable tournant car elle a ouvert les yeux de nombreuses personnes en France. Selon un sondage, 72 pour cent estiment que le sort de Gisèle Pélicot témoigne de « la permanence et de la banalisation des violences sexuelles dans notre société ». Depuis des semaines, partout au pays, des citoyens descendent dans la rue pour manifester contre les violences sexuelles. La célèbre phrase de Gisèle Pelicot apparaît sur leurs affiches : « La honte doit changer de camp ».
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Il se pourrait même que le droit pénal français soit désormais adapté : il serait alors considéré comme un viol si le consentement de la victime fait défaut. Nous avons déjà cette réglementation en Allemagne. Bien que le mot « consentement » soit absent de notre paragraphe 177, les actes sexuels peuvent être punis si « l’auteur profite de l’incapacité de la personne à former ou à exprimer une volonté contradictoire ». Mais les militants des droits des femmes souhaitent désormais aller beaucoup plus loin. Mi-octobre, une cinquantaine d’organisations se sont réunies pour former une alliance appelant à une « loi mondiale » contre les violences sexuelles. Et tout cela grâce à une femme qui a eu le courage de rendre publique son histoire.
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